jeudi 20 mai 2010

Mon coeur est venu souffler dans ton oreille

Mon coeur est venu souffler dans ton oreille,
Rendu  disert  par  le  jus  de  la  treille,
Le vrai dans son plus simple appareil:
Tu  es  à  nulle  autre  pareille.
Je sais que tu me surveilles.
Aucun  rêve  ne  m'effraye
En mon lourd sommeil:
Loin  de  l'éveil,
Mon  soleil
Mireille
Veille.

mercredi 19 mai 2010

Mon amour secret

Il est là. Allongé. Lui. Mon amour secret.
Mon regard a plongé vers la ligne parfaite
De cette nuque nue aux reflets mordorés
Dans ce plaisir ténu d'admirer l'adoré.

Dans sa pose endormie, mon émoi se recrée.
Nul n'a surgit hormis mon honteuse défaite
De ma lutte intérieure envers l'amour vilain
Pour son visage rieur et son nez aquilin.

"Poussin?" m'interpelle mon compagnon de vie
Pensivement penché sur les derniers devis
Posés sur le plancher où il s'est accroupi.

"Chut!" dis-je à l'appel. Le coupable sentiment
Me fait, au fond de moi, répondre gentiment:
"Abaisse un peu ta voix, ton frère est assoupi."

mardi 18 mai 2010

Laisse moi t'effacer...

Hier, j'étais si heureux. Vancouver, c'était toi,
Seul objet de mes voeux, mon bonheur canadien.
Un drapeau rouge et blanc, Halloween, tous ces riens
Me rappelaient souvent le plaisir de ta voix.

Aujourd'hui, malheureux, je ne suis plus capable
D'éviter les hideux rappels de notre histoire:
Qu'on me dise Québec, et soudain ma mémoire
Fait surir le pancake et le sirop d'érable.

Et partout, chaque instant, soudain, sans coup férir,
Tu es là ternissant le moindre des plaisirs,
Comme un ver dans le fruit, comme un son qui dissone.

Je veux un effaceur, du Tipp-Ex , une gomme,
Supprimer ma douleur, redevenir un homme
Pouvant aimer autrui et l'érable en automne.

lundi 10 mai 2010

Ils dansent devant toi

Sois patient, ô mon coeur! Sois patient, ô mon âme!
Attends encore un peu. Attends, il n'est pas temps.
Cache donc ton malheur; que s'éteigne la flamme
De ton mal douloureux; qu'il ne soit trop patent.

Ils dansent devant toi, rayonnants de bonheur,
Sautillant de concert sur ce joyeux refrain,
L'ex-gardien de ta foi et ton usurpateur,
Face au coeur qui se serre et qui ronge son frein.

Calme tes alarmes, il fait beau aujourd'hui.
Il te faut rester digne, il te faut les leurrer:
Face au malheur insigne, il ne faut pas pleurer.

Car si tu l'as perdu, reste la dignité:
Au regard éperdu choisis la fixité;
Pour montrer tes larmes, attends les jours de pluie.

vendredi 7 mai 2010

Il attend patiemment

Il attend patiemment. Son regard déjà voit
Le sourire indulgent et le son de sa voix.
Il attend, il savoure à l'avance, il espère
L'arrivée de l'amour et de ses beaux yeux clairs

Le soir éteint le jour. Et bien sûr il s'inquiète:
Souhaitera-t-il bonjour à cette jolie tête?
Le doute un peu l'étreint mais il garde l'espoir:
Quand il y a tant de trains, peut-on rester en gare?

La nuit déjà s'avance. Et il attend encore.
Mais son esprit balance, et pour ses désaccords,
S'oublie dans l'étude de l'éclairage urbain.

Car la solitude, ce n'est rien que quelqu'un,
Au coin du bâtiment, où le pavé résonne,
Qui attend. Qui attend. Et qui n'attend personne.

jeudi 6 mai 2010

Somewhere I have never travelled, gladly beyond

Ma traduction d'un très joli et célèbre poème de Edward Estlin Cummings.



somewhere I have never travelled, gladly beyond
any experience, your eyes have their silence:
in your most frail gesture are things which enclose me,
or which I cannot touch because they are too near


Quelque part où je n'ai jamais voyagé,
Au delà de toute expérience
Heureusement, tes yeux ont leur silence:
Le plus fragile de tes gestes englobe
Des choses qui me contiennent ou se dérobent
A mon toucher parce qu'ils me sont trop près.

your slightest look easily will unclose me
though I have closed myself as fingers,
you open always petal by petal myself as Spring opens
(touching skilfully, mysteriously) her first rose

Même fermé comme un poing serré,
Je m'entrouvrirai à ton plus léger regard ,
Comme le Printemps desserre avec égards,
(Talent adroit, mystérieux à toute chose)
Pétale à pétale la première rose
Qu'il ouvre avant la venue de l'Eté.


or if your wish be to close me, I and
my life will shut very beautifully, suddenly,
as when the heart of this flower imagines
the snow carefully everywhere descending;

Ou si tu me souhaitais complètement fermé,
Ma vie et moi s'éteindraient soudainement,
Mais aussi sans doute très joliment,
Comme quand le coeur de cette fleur se protège
A l'idée que puisse tomber la neige
Partout, soigneusement et avec légèreté.

nothing which we are to perceive in this world equals
the power of your intense fragility: whose texture
compels me with the color of its countries,
rendering death and forever with each breathing

Rien n'égale ton intense fragilité,
Rien de perceptible du moins en ce bas monde.
Et même l'éternité, et même la mort immonde,
Succombent, au rythme de tes respirations,
Par la couleur de toutes ses nations,
A sa texture et à son toucher.

(I do not know what it is about you that closes
and opens; only something in me understands
the voice of your eyes is deeper than all roses)
nobody, not even the rain,has such small hands

(Je ne sais ce qui en toi me fait fermer
Ou m'ouvrir. Il y a juste en moi une chose
Qui comprend intimement que toutes les roses
Sont moins profondes que la voix de tes yeux.)
Rien, même les gouttes quand il pleut,
Rien ni personne n'a une plus petite poignée.

mardi 4 mai 2010

Le parfum

Tous me le redisent, tu me le dis encore:
Je suis, friandise, pourvoyeur de plaisirs;
Et le sucré parfum qu'exhale mon doux corps,
Du début à la fin, suscite le désir.

Vois donc mes amants, dociles éphèbes,
Elever constamment leur lance impudique
A la moindre senteur et d'humus et de glèbe
Que j'émets, tentateur, en mes humeurs ludiques!

Je suis l'odeur du vin, enivrante et sensuelle:
Je te monte à la tête en plaisir résiduel.
De mousse est mon parfum, venez donc me humer!

Je suis le jeune Automne, je suis l'ultime Amour,
Le dernier temps de fête avant la mort du jour!
Que tous se pelotonnent autour de mon fumet!